Ce n’est pas le moindre des paradoxes. Alors que la France essuie une inflation galopante qui touche particulièrement les produits alimentaires et que, plus spécifiquement, les produits festifs ont vu leur prix s’envoler en moyenne de 11 % à 12,5 %, selon les cabinets spécialisés NielsenIQ et IRI, les Français ne veulent pas sacrifier leur repas de Noël.
Dans une fin d’année morose, où les mauvaises nouvelles se cumulent au plan national (défaite à la coupe du monde, grève à la SNCF, neuvième vague du Covid, inquiétude sur de possibles coupures d’électricité, et surtout poursuite de la hausse des prix) et international (dix mois déjà de guerre en Ukraine, le Covid prêt à submerger la Chine, la répression en Iran des manifestants pour la liberté), Noël constitue toujours le cocon rassurant face à la marche du monde, et le repas qui l’accompagne, le moment de convivialité qui, entre huître et foie gras, dinde et bûche, réchauffe les cœurs avant d’affronter les défis de 2023.
Dans un pays comme le nôtre qui a érigé la gastronomie en art de vivre, le repas de Noël conserve une place à part, à la fois moment de retrouvailles familiales et de partage des meilleurs mets, moment de grande tradition qui convoque pour tous des souvenirs d’enfance, et moment de transmission entre générations. « Il ne faut pas tant regarder ce qu’on mange qu’avec qui on mange », relevait en son temps Epicure, comme pour mieux souligner combien sont inextricablement liés ce qu’il y a dans l’assiette que ce qu’il y a autour. Bousculé par l’inflation, ce Noël 2022 sera différent des deux précédents chamboulés par le Covid.
Mais chaque famille se sera adaptée aux circonstances avec un seul objectif : préserver ce moment unique pour, une fois encore, passer un joyeux Noël et des fêtes ensemble.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 23 décembre 2022)