Accéder au contenu principal

Le défi de l'avion vert

 

A319

Sans préjuger de ce que provoquera la 5e vague de l’épidémie de Covid-19, on constate pour l’heure que l’économie mondiale a amorcé une reprise après des mois de paralysie provoquée par le coronavirus et entrevoit la fin d’une période qui aura mis genoux nombre de secteurs. Parmi ceux-ci, celui de l’aviation aura payé un lourd tribut, que ce soit pour les compagnies aériennes qui ont subi une chute historique du trafic aérien – – 66 % de baisse, du jamais vu depuis le 11-Septembre – ou les constructeurs qui ont enduré l’annulation de commandes. Pour tous les métiers qui, de près ou de loin, travaillent pour l’aérien, le choc a été redoutable et sans doute les aides publiques en France – chômage partiel, prêts garantis par l’Etat et plan de soutien à la filière aéronautique (15 milliards d’euros mobilisés) – ont permis d’éviter un crash socio-économique pour les quelque 300 000 emplois directs et indirects dans notre pays.

Aujourd’hui, la situation s’améliore, le trafic reprend et les constructeurs retrouvent le sourire, du moins chez Airbus. Les résultats du constructeur européen présentés le 28 octobre – un bénéfice net de plus de 2,6 milliards d’euros au 30 septembre et 424 avions commerciaux livrés au cours des neuf premiers mois – constituent de belles promesses pour la suite. Chez Boeing en revanche, l’espoir suscité par la reprise des livraisons du 737MAX est assombri par de nouveaux déboires, ceux du 787 Dreamliner. Pour autant nous ne sommes pas revenus à la situation pré-Covid, le retour à la normale n’étant pas attendu avant 2024 au mieux.

D’ici là, le secteur aérien va se trouver confronté à deux défis majeurs : celui de la consolidation et celui du réchauffement climatique. Après la phase de survie face au Covid, la consolidation, c’est-à-dire l’intégration d’activités, apparaît indispensable et s’amorce lentement via le fonds Aéro Partenaires créé en juin 2020 par l’Etat, Airbus, Safran, Dassault Aviation et Thales.

Le défi du réchauffement climatique, autrement dit la diminution des gaz à effet de serre dont la COP26 montre à nouveau la nécessité, est autrement plus complexe et n’offre que deux choix : la sobriété, c’est-à-dire moins de trajets aériens et donc la reconversion de milliers de salariés, ou l’innovation, c’est-à-dire l’avion vert. Deux choix pas forcément incompatibles d’ailleurs mais qui supposent du consensus et de l’audace.

L’Europe, qui vise la neutralité carbone d’ici 2050 et une réduction de 45 % des émissions de CO2 de tous les vols domestiques et au départ de l’UE d’ici 2030, ne manque pas d’ambition ; elle a même créé une Alliance européenne pour « l’aviation zéro émission ». C’est que dans la course mondiale à cet avion vert pour l’heure utopique – qu’il soit électrique, hybride, à hydrogène ou avec des biocarburants –, derrière l’objectif environnemental se trouvent des enjeux économiques et géopolitiques colossaux. Mieux vaut ne pas rater ce rendez-vous et comme disait Saint-Exupéry ne pas essayer de prévoir l’avenir mais bien de le rendre possible.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 5 novembre 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...

La messe est dite ?

    L’entourage de François Bayrou a beau tenter d’expliquer que l’échec du conclave sur les retraites n’est imputable qu’aux seuls partenaires sociaux qui n’ont pas réussi à s’entendre en quatre mois pour « améliorer » la contestée réforme des retraites de 2023, la ficelle est un peu grosse. Car, bien évidemment, cet échec – hélas attendu – est aussi celui du Premier ministre. D’abord parce que c’est lui qui a imaginé et convoqué cette instance inédite de dialogue social et qu’il aurait naturellement revendiqué comme le succès de sa méthode un accord s’il y en avait eu un. Ensuite parce qu’il n’a pas été l’observateur neutre des discussions, qu’il promettait « sans totem ni tabou ». Il a au contraire, plusieurs fois, interféré : dès leur lancement en les corsetant par une lettre de cadrage imposant de ne pas créer de dépenses et d’équilibrer les comptes à l’horizon 2030 ; ensuite par son refus de voir abordé l’âge de départ à 64 ans, point centra...

Urgence démographique

  Présentées dans la torpeur de l’été, les statistiques démographiques de l’Insee devraient pourtant tous nous inquiéter et nous réveiller. Avec une baisse de 2,2 % du nombre quotidien de naissances moyen entre le premier semestre 2024 et celui de 2025, la France devrait atteindre une nouvelle fois son plus bas niveau depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, et cela pour la quatrième année consécutive, sans que l’on perçoive la possibilité d’un retournement prochain de situation. Dans le même temps, en cumul de janvier à juin, le nombre de décès quotidien moyen est plus élevé en 2025 qu’il ne l’était un an auparavant : + 2,5 %. Implacable logique d’un solde naturel qui montre d’un côté une France qui ne fait pas assez d’enfants, de l’autre une France dont la population vieillit à grande vitesse. Au 1er janvier 2025, 21,8 % des habitants avaient au moins 65 ans, contre 16,3 % en 2005 ; les personnes âgées d’au moins 75 ans représentent désormais 10,7 % de la population, contre 8...