Les producteurs français de vin ont le blues. Dans les allées du salon Wine Paris-Vinexpo, premier événement de l’année pour les professionnels, qui vient de s’achever, l’heure est à l’inquiétude. Car depuis plusieurs mois, les nuages s’amoncellent au-dessus des vignobles français et donc aussi ceux d’Occitanie.
Inquiétude la plus exprimée, celle de la surtaxation à l’importation par les Etats-Unis. Ulcéré de voir l’Europe, et la France au premier rang, s’attaquer via une taxe GAFA à l’optimisation fiscale des géants d’internet – tous américains – Donald Trump a brandi l’été dernier la menace de mesures de rétorsion visant, entre autres, les vins français. "J’ai toujours dit que le vin américain était meilleur que le vin français !" fanfaronnait l’hôte de la Maison Blanche – qui ne boit pourtant jamais une goutte de vin. Instaurée en octobre, cette taxe de 25 % sur certains vins a eu des conséquences catastrophiques pour nombre de viticulteurs : les exportations se sont effondrées de 44 % en novembre… Dur pour la France qui exporte pour 1,6 milliard d’euros de ses bouteilles outre-Atlantique.
Depuis le mois dernier, un nouvel écueil menace les exportations : l’épidémie du coronavirus. Pour faire face au CoViD-19, la Chine est quasiment en quarantaine et les échanges économiques se sont réduits. Pire, la foire des vins et spiritueux de Chengdu, le plus grand salon professionnel dédié aux boissons alcoolisées en Chine continentale, a été reportée… Un coup d’autant plus dur que les importations de vins en Chine étaient orientées à la baisse.
Au-delà des seules exportations, les viticulteurs français doivent faire face à au moins d’autres problèmes domestiques. Le premier, récurrent, a donné lieu à une vive polémique au moment des fêtes entre professionnels du vin et addictologues autour de l’opération "Janvier sans alcool". Entre ceux qui dénoncent – à raison – les dangers de l’alcool et ceux qui plaident – à raison tout autant – pour la prise en compte du vin comme partie intégrante du patrimoine français, le débat a tout sauf été modéré.
Vient ensuite l’épineux dossier de l’usage des pesticides qui va franchir ce vendredi une étape-clé avec la décision du Conseil d’Etat sur le décret encadrant l’usage de ces substances, notamment sur les distances de précaution instaurées entre les zones d’épandage et les habitations.
Mais il est une autre menace beaucoup plus grave que toutes les autres pour les vignobles : le réchauffement climatique. La hausse de 2° des températures est inéluctable et sera atteinte bien avant 2050, ce qui va provoquer de profonds bouleversements. Floraison et vendanges plus précoces, augmentation du niveau alcoolique, difficulté à irriguer en raison de la multiplication des sécheresses, etc.
Les vignerons vont devoir s’adapter à ces nouvelles contraintes en travaillant sur les cépages ou les techniques de culture. Un véritable défi dans lequel se joue l’avenir d’une filière économique importante pour le pays mais aussi une part de l’art de vivre à la française.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 14 février 2020)