Le hasard du calendrier aura voulu que le ToBRFV, le "virus de la tomate", dont la présence a été confirmée dans des serres du Finistère et qui fait peser un risque économique pour toute la filière, apparaisse au moment où le monde est en crise avec une crise sanitaire majeure, celle du coronavirus chinois CoViD-19. D’un côté comme de l’autre, l’on fait face à des maladies sans traitement connu, potentiellement mortelles et qui, toutes proportions gardées, partagent trois traits communs.
Le premier, c’est la rapidité de propagation. Dans un monde à l’économie globalisée, l’accroissement permanent de la circulation des marchandises et des personnes, le brassage des denrées et des individus favorisent la dissémination de nombreuses maladies infectieuses. Comme le rappelait récemment le Haut conseil de la santé publique, "le vieux concept de maladies tropicales, ou de maladies exotiques, est en passe de perdre sa spécificité." Le coronavirus s’est diffusé dans le monde très rapidement et a touché plus rapidement plus d’individus que le Sras il y a vingt ans. Le virus de la tomate, apparu en 2014 en Israël, mais aussi d’autres maladies comme celle qui touche les oliviers, s’est diffusé plus lentement mais tout aussi sûrement en passant par la Jordanie, le Mexique ou les Etats-Unis. La progression des maladies des plantes et cultures est de plus parfois facilitée par les conséquences du réchauffement climatique, par les importations illégales et parfois par le commerce de semences ou de végétaux hôtes.
Le second point commun entre ToBRFV et CoViD-19, c’est le besoin absolu de transparence pour endiguer – ou tenter de le faire – ces épidémies. En refusant d’écouter les lanceurs d’alerte de Wuhan, les autorités chinoises, locales et nationales, ont perdu du temps et ont vraisemblablement permis une première dissémination dans la région du Hubei qui aurait, peut-être, pu être empêchée. En lançant dès le 3 février une alerte sur le virus de la tomate, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a permis à toute la filière de production de tomates de prendre les premières mesures prophylactiques. Et dans un cas comme dans l’autre, c’est le respect des consignes de confinement qui permet de limiter la propagation.
Enfin, le troisième point commun entre les deux virus, c’est la communauté scientifique qui est mobilisée. La recherche d’un vaccin contre le coronavirus implique ainsi des laboratoires publics et des biotechs dans plusieurs pays engagés dans une course contre la montre. La recherche biologique est de son côté beaucoup plus complexe. On peut être tenté de recourir à des pesticides qui impactent négativement l’environnement ou des plantes génétiquement modifiées auxquelles le grand public n’adhère pas. Il existe toutefois une autre voie qui a été illustrée de façon éclatante en 2017. L’Institut national de la recherche agronomique a créé par croisements une nouvelle variété de tomate, non-génétiquement modifiée, plus goûteuse et résistante à huit pathologies, donc nécessitant moins de pesticides.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 19 février 2019)