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Désamorcer la bombe

immobilier

La crise du logement va-t-elle – enfin – devenir un sujet politique majeur en France comme elle l’est aux Pays-Bas qui viennent de porter en tête de leurs élections législatives le Parti pour la liberté (PVV), la formation d’extrême droite de Geert Wilders ? La question du logement était, en effet, devenue le principal sujet électoral du scrutin hollandais, et les promesses de nouvelles constructions figuraient en bonne place dans les programmes des partis politiques. C’est que le pays de moins de 18 millions d’habitants est confronté à une pénurie d’environ 400 000 logements. Un déficit qui impacte plus durement les étudiants, certains étant contraints de squatter ou de vivre dans des campings ou des auberges…

L’exemple danois devrait faire réfléchir en France où l’immobilier semble s’enliser dans la crise à tous les niveaux sans que l’on voit advenir une réponse massive du gouvernement. La spirale paraît infernale. La hausse des taux d’intérêt et la frilosité des banques à accorder des prêts empêchent beaucoup de Français d’acheter un logement, neuf ou ancien. La FNAIM s’alarme d’ailleurs face à « la plus forte baisse des ventes sur un an jamais observée depuis plus de 50 ans ». Restant locataires de leur logement, ils engorgent un marché de la location où très peu de logements se libèrent voire saturent des hébergements d’urgence.

À l’autre bout de la chaîne, le nombre de logements en construction et le nombre de permis de construire sont en chute libre, et le secteur du BTP fait de plus face à l’inflation des coûts des matériaux. Entre les deux, certains propriétaires finissent par se séparer de leurs biens locatifs en raison d’une réglementation trop contraignante, notamment concernant l’interdiction de la location des passoires thermiques, ce qui fait mécaniquement augmenter la pénurie d’appartements à louer.

Ce cercle vicieux commence à inquiéter certains responsables politiques. Olivier Klein, l’ancien ministre délégué chargé de la Ville et du Logement, qui a piloté le lancement en novembre 2022 du Conseil national de la rénovation (CNR) dédié au logement, avait évoqué « un risque de bombe sociale ». L’ancien Premier ministre Édouard Philippe avait repris les mêmes termes début octobre lors de l’Université de rentrée du MoDem, mettant en garde contre la « bombe sociale » et « urbaine » que constitue à ses yeux la pénurie de logements, « un des éléments de la crise démocratique que nous vivons », selon lui.

Enfin, dimanche dernier dans la Tribune, l’ancien président de l’Assemblée nationale François de Rugy estimait que « le gouvernement répète les mêmes erreurs ». Fustigeant « la passivité » de certains responsables politiques qui attendraient d’hypothétiques jours meilleurs et Bercy qui « cherche à faire des économies […] sur les dépenses en faveur du logement », l’ancien ministre considère « qu’il est temps de prendre la pleine mesure du problème du logement en France. »

Depuis 2017, le logement a été l’angle mort du macronisme et ce n’est que l’an dernier qu’Elisabeth Borne, nourrie des débats du CNR, a lancé un plan d’action, tardif et jugé insuffisant par les professionnels. Pour désamorcer la bombe sociale et ses conséquences politiques, il faut d’évidence aller plus loin.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 4 décembre 2023)

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