Aujourd’hui les avocats de Cédric Jubillar vont demander une nouvelle fois la remise en liberté de leur client. Mis en examen pour meurtre aggravé après la disparition de son épouse Delphine dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, Cédric Jubillar est incarcéré depuis maintenant un an. Douze mois derrière les barreaux sans que l’on sache au final qui est vraiment cet homme et quel rôle il a pu jouer ou non dans la disparition de la jeune infirmière ?
Quelle est la personnalité de ce père de deux enfants, qui avait participé activement aux battues et aux recherches de son épouse ? Qui est ce peintre-plaquiste dont on a découvert au printemps 2021, avec surprise, la nouvelle compagne Séverine, amie devenue amante et confidente, avec laquelle il a échangé de nombreux courriers dans lesquels il écrivait « On ne peut avoir confiance en personne, sauf entre nous deux au final… ». Celui qui avait confié à un codétenu avoir tué et enterré sa femme est-il un manipulateur et un menteur comme le soupçonnent la justice et les enquêteurs ? Ou alors est-il injustement accusé et maintenu en détention alors que l’enquête, qui a connu des ratés et dont les témoignages à charge sont fragiles, n’a toujours pas permis de retrouver de corps ni un élément capital à même de faire basculer l’affaire ?
Ce jeudi, c’est dans ce contexte plein d’incertitudes que le juge des libertés et de la détention va donc se pencher sur une nouvelle demande de remise en liberté de Cédric Jubillar. La détention provisoire est-elle toujours utile ? Permet-elle d’exercer une pression suffisante pour « faire craquer » le suspect numéro un ? Ou au contraire est-elle désormais inutile voire abusive, et devrait être remplacée par un contrôle judiciaire strict comme une assignation à résidence avec bracelet électronique ? Le juge des libertés et de la détention va évidemment examiner la demande de Cédric Jubillar en droit, mais peut-il faire abstraction de l’émoi considérable qu’a suscité cette affaire dans l’opinion publique depuis 18 mois ? Une opinion d’autant plus sensible à cette disparition tarnaise que d’autres affaires, très similaires bien que sans lien entre elles, sont apparues en Corrèze et dans l’Yonne. À l’heure où la société française a pris conscience des violences faites aux femmes qui débouchent parfois sur de terribles féminicides, l’affaire Jubillar, affaire judiciaire, est à cet égard aussi un symbole. Mais un symbole qui attend toujours sa vérité.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 9 juin 2022)