Bis repetita, retour à la case départ : les prix des carburants à la pompe atteignent en ce moment de nouveaux records, plus élevés encore qu'en novembre dernier, où la flambée des prix avait alors déclenché le mouvement des Gilets jaunes. Une hausse qui tombe évidemment très mal pour le gouvernement même si, comme l'avait dit trivialement Emmanuel Macron, «c'est pas Bibi» qui en est responsable. De fait, cette hausse est avant tout due aux nombreuses tensions géopolitiques en Iran, en Libye, ou encore au Venezuela. Des tensions avivées par la politique étrangère de Donald Trump – le président américain profitant de voir les Etats-Unis et leur dollar fort redevenir premier producteur mondial de pétrole – et par les choix des pays de l'Opep qui réduisent leur production pour faire grimper le prix du baril. Un prix qui pourrait d'ailleurs continuer à grimper selon les spécialistes.
Face à cette nouvelle donne, la France – où les taxes représentent plus de 60 % du prix – et plus largement l'Europe, peuvent avoir trois attitudes.
La première consiste à mettre en place des mécanismes régulateurs qui conduisent à amoindrir les taxes, mais ils atteignent vite leurs limites. La taxe flottante qu'avait mise en place le gouvernement Jospin entre 2000 et 2002 avait coûté près d'1,3 milliards à l'Etat pour une baisse très modeste de 2,2 centimes par litre. Emmanuel Macron, qui a déjà annulé fin 2018 la hausse de la taxe carbone prévue pour cette année, n'entend pas prendre de «mesure d'exception» cette fois.
D'où la seconde option : il faut réduire notre dépendance au pétrole et inciter les Français à changer de voiture. Imparable sur le papier. Mais cette simple évidence se révèle être pernicieuse lorsqu'il s'agit de dégager des aides à la conversion pour des Français qui ont longtemps été incités à rouler gazole et pour des constructeurs d'automobiles qui ont beaucoup misé sur le diesel. De fait, les aides gouvernementales pour acquérir un véhicule moins polluant profitent majoritairement à des véhicules d'occasion… diesel. Autant dire que la dépendance au pétrole reste toujours de mise.
Dès lors, seule la troisième solution – la plus difficile – apparaît être la bonne : des investissements massifs dans les véhicules électriques ou à hydrogène, et en même temps le développement de transports en communs efficaces. Cette solution suppose une vraie révolution autant psychologique qu'industrielle assortie d'un vrai volontarisme politique. Les Européens sont prêts à acquérir des véhicules électriques pour peu que les constructeurs proposent des modèles attractifs et au juste prix ; et que les infrastructures de recharge soient mises en place. Atteindre cette mobilité durable devrait être l'un des grands chantiers de l'Union européenne.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 13 mai 2019)