La fraude aux prestations sociales est un fléau et il est évident qu'il faut la combattre. Ceux qui trichent se mettent hors la loi en s'appropriant indûment l'argent des autres assurés et, surtout, ils pervertissent le principe de prestations pensé à la Libération et qui bénéficie depuis à tous les Français. Il est donc heureux que l'État, depuis une dizaine d'années, ait mis davantage de moyens pour permettre d'effectuer des contrôles.
Ceux-ci sont d'ailleurs capitaux car ils permettent de séparer les allocataires de bonne foi qui, par oubli, inadvertance ou en raison de la complexité des documents administratifs, se voient verser un trop perçu, des fraudeurs «professionnels», qui, eux, mettent au point des stratagèmes insensés pour parvenir à s'accaparer des aides sociales qu'ils ne devraient pas toucher.
Pour les premiers, un droit à l'erreur paraît logique et un meilleur accompagnement de ces personnes dans les arcanes administratifs est souhaitable. La récente loi Essoc encourage d'ailleurs les organismes à aller dans ce sens. En revanche pour les seconds, les vrais fraudeurs, la justice doit se montrer intraitable.
La lutte contre la fraude aux prestations sociales porte d'ailleurs ses fruits, davantage sans doute en raison de ces contrôles plus nombreux et plus pertinents (avec de nouvelles méthodes de croisement de données), que d'une explosion démesurée des affaires comme voudraient le faire croire certains. Car si ce type de fraude – qui de toute façon reste difficile à estimer puisque par nature il découle de dissimulation – est plutôt mesuré, il charrie un lot de fantasmes et de contrevérités qui nourrit nombre de discours politiques. Chacun se souvient du « cancer de l'assistanat » de Laurent Wauquiez…
La réalité est tout autre. Non seulement on s'aperçoit que certaines personnes éligibles à des aides ne les demandent pas – par exemple le Revenu de solidarité active (RSA) – mais le volume de fraude reste globalement très faible avec un taux de fraude de 0,35 % des allocataires (entre 0,19 et 0,67 % en Occitanie).
Au final, la fraude sociale (prestations mais aussi cotisations) représente un détournement de 1,29 milliard d'euros, selon la Délégation nationale de lutte contre la fraude (DNLF) quand la fraude fiscale représente un manque à gagner pour l'Etat évalué… entre 60 et 80 milliards d'euros.
S'il est sain de dénoncer la fraude aux prestations sociales, il convient donc de ne pas oublier les autres fraudes qui lèsent l'État et qui sont, on le voit, d'un tout autre volume…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 31 mai 2019)