En annonçant hier qu’elle ne briguerait pas un troisième mandat de maire de Paris après des mois à entretenir à dessein le suspense, Anne Hidalgo a comme lancé la bataille des municipales de 2026. Des élections cruciales dans la vie des Français, mais qui passaient sous les radars de l’agenda médiatique, quasi-exclusivement consacré à la politique nationale depuis les européennes et les législatives anticipées qui ont abouti à l’inextricable situation politique que l’on connaît. Donner un coup de projecteur sur ce scrutin – le premier inscrit au calendrier, sauf si une nouvelle dissolution intervenait l’été prochain – est important car ces élections revêtent au moins trois grands enjeux.
Enjeu démocratique d’abord. La pandémie de Covid-19 avait conduit, lors des élections municipales de 2020, à espacer les deux tours de plus de trois mois, ce qui a bouleversé les taux de participation mais aussi le jeu des alliances d’entre-deux tours, les reports de voix et même les priorités affichées par les candidats, voire les attentes des électeurs. Avec le scrutin de mars 2026, on retourne à la normale avec une campagne électorale classique en un temps limité.
Dans un contexte de défiance des citoyens face aux hommes et femmes politiques, le maire reste l’élu préféré des Français, parce que ses décisions impactent directement leur quotidien et leur environnement. Parce que les conseillers municipaux que l’on côtoie dans sa ville sont aussi « à portée d’engueulade », peut-être trop parfois. Les incivilités, voire les violences contre les élus, se sont multipliées ces dernières années de façon insupportable. Une pression qui s’ajoute aux sollicitations incessantes des administrés. À cela s’adjoint le sentiment chez certains maires de ne plus avoir les moyens financiers de leurs missions ou de voir leurs marges de manœuvre diminuer face aux intercommunalités. Pas étonnant dès lors que certains maires aient envisagé la démission voire sont passés à l’acte. On n’en est pas encore à une crise des vocations ou à une vague de démissions, mais en 2020, 106 villes et villages n’avaient aucun candidat déclaré et beaucoup de maires avaient refusé de rempiler. Si l’on veut faire perdurer l’envie de s’engager au service de sa commune, il y a urgence à enfin définir un vrai statut de l’élu. Michel Barnier l’a promis pour début 2025. Il est temps.
Enjeu politique ensuite. Si les élections municipales vont se traduire par des scrutins dans les 34 935 communes de France, et que nombre de candidats à la mairie se présentent sans étiquettes partisanes, elles n’en recouvrent pas moins une lecture nationale pour les villes et les grandes métropoles. Car contrairement à ce que certains veulent faire croire, le poids des formations politiques ne saurait se mesurer uniquement au score du premier tour de l’élection présidentielle ou à celui des élections européennes. Quelles alliances locales vont se faire, à gauche, à droite, au sein du bloc central ? Les écologistes qui avaient conquis plusieurs villes pourront-ils les conserver ? Le RN peut-il en conquérir d’autres et LFI faire une percée ? Les municipales sont d’autant plus importantes qu’elles fournissent le gros du corps électoral pour les élections sénatoriales.
Enjeux sociétaux enfin. En France comme à l’étranger, on voit que l’échelon local est celui des solutions. Il gagne en pertinence pour relever les grands défis de notre temps et préparer la société de demain, notamment pour la transition écologique, les transports, la santé… Autant de raisons qui vont faire des municipales de 2026 un grand rendez-vous pour le pays.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 27 novembre 2024)