Accéder au contenu principal

Au pied du mur

 

chauffage

Lorsqu’Élisabeth Borne a dévoilé le plan de sobriété énergétique du gouvernement, le 6 octobre dernier, les Français avaient la tête ailleurs, davantage préoccupés par la hausse des prix alimentaires ou des carburants. Les températures étaient, de plus, quasi printanières ce jour-là, bien au-dessus des moyennes saisonnières. En Occitanie, elles étaient même au-delà des 20 °C avec des pics à 26° à Perpignan, 25° à Montpellier, 23° Toulouse… Autant dire que l’hiver semblait bien loin et avec lui les interrogations pour se chauffer au meilleur prix compte tenu de l’inflation galopante affectant les énergies. Les appels gouvernementaux à la sobriété énergétique, relayés par la campagne un brin paternaliste « Je baisse, j’éteins, je décale », semblaient aussi tomber à plat.

Mais depuis, les températures ont singulièrement baissé et la France se retrouve bel et bien au pied du mur pour affronter le défi énergétique de cet hiver. Le gouvernement peut se targuer – à raison – d’avoir mis en place de nombreuses aides financières pour limiter à 15 % la hausse des prix du gaz et de l’électricité qui va intervenir le 1er janvier, pour aider les Français qui se chauffent encore au fioul, ou pour contribuer à installer des thermostats.

Depuis l’automne 2021, le déploiement du « boucler tarifaire » sur l’énergie (en incluant les ristournes carburant) a déjà coûté quelque 24 milliards d’euros à l’État. Un « quoiqu’il en coûte » conséquent, qui va s’élargir aux entreprises, au point qu’il a fini ce mardi par inquiéter le Fonds monétaire international (FMI) qui a appelé la France à y mettre un terme en 2023… Mais un quoiqu’il en coûte forcément utile pour les Français qui s’inquiètent de voir la part de leur budget consacrée à l’énergie bondir au-delà des 10 %.

Pour éviter l’explosion de leur facture, les Français ont d’ores et déjà adopté la sobriété et les éco-gestes, fixant à 19° la température dans leur logement, ou surveillant leur consommation grâce aux nouveaux outils numériques. Certains ont même anticipé des travaux d’isolation ou de changement de chaudière. Des efforts mesurés par exemple par RTE qui a constaté une diminution de la consommation d’électricité de l’ordre de 5 à 7 % par rapport à son niveau de 2019.

À cette sobriété « choisie » par la force des choses fait écho une sobriété « subie » de longue date par les Français qui sont en situation de précarité énergétique. Les associations estiment, en effet, que 20 % des Français – soit 12 millions de personnes – sont concernés par cette insupportable précarité énergétique qui a de lourdes conséquences. D’après une étude économétrique de l’OFCE, le fait d’habiter dans un logement difficile à chauffer accroît de 50 % le risque de se déclarer en mauvaise santé… Il y a donc plus que jamais urgence à s’attaquer à ce mal-logement et en premier lieu aux passoires thermiques. Un défi au long cours comme l’a rappelé Elisabeth Borne à l’Assemblée, en estimant que la sobriété, et tout ce qu’elle implique comme politiques socio-économiques, énergétiques et environnementales, « n’est pas la mode d’un hiver. »

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 23 novembre 2022).

Posts les plus consultés de ce blog

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...

La messe est dite ?

    L’entourage de François Bayrou a beau tenter d’expliquer que l’échec du conclave sur les retraites n’est imputable qu’aux seuls partenaires sociaux qui n’ont pas réussi à s’entendre en quatre mois pour « améliorer » la contestée réforme des retraites de 2023, la ficelle est un peu grosse. Car, bien évidemment, cet échec – hélas attendu – est aussi celui du Premier ministre. D’abord parce que c’est lui qui a imaginé et convoqué cette instance inédite de dialogue social et qu’il aurait naturellement revendiqué comme le succès de sa méthode un accord s’il y en avait eu un. Ensuite parce qu’il n’a pas été l’observateur neutre des discussions, qu’il promettait « sans totem ni tabou ». Il a au contraire, plusieurs fois, interféré : dès leur lancement en les corsetant par une lettre de cadrage imposant de ne pas créer de dépenses et d’équilibrer les comptes à l’horizon 2030 ; ensuite par son refus de voir abordé l’âge de départ à 64 ans, point centra...

Fragilités

Les images que les Français ont découvertes cette semaine à l’occasion des violentes intempéries qui ont frappé le Sud-Ouest étaient spectaculaires : un TGV comme suspendu dans le vide, reposant sur des rails sous lesquels le ballast a été emporté par des flots déchaînés. Inouï comme le nom du train qui transportait quelque 500 passagers qui se souviendront longtemps de leur voyage et de leur évacuation en pleine nuit à Tonneins – parfaitement maîtrisée par les secours, les personnels de la SNCF et les agents de la ville. Le jour d’après, à l’issue du remorquage du TGV, avait des allures de gueule de bois pour tout le monde devant les dégâts considérables sur la voie de chemin de fer. 200 mètres sont complètement à refaire, les pluies torrentielles ayant emporté la terre du remblai, la sous-couche et le ballast. Et si les travaux ont commencé dès après les orages, ils vont être longs, bloquant la liaison entre Toulouse et Bordeaux. La SNCF mise sur une reprise du trafic entre le me...