Samedi prochain, porte de Versailles à Paris, s’ouvrira ce que l’on appelle communément la plus grande ferme de France, le salon international de l’agriculture. Ce grand rendez-vous du monde agricole, après l’année blanche imposée par le Covid-19, devrait accueillir dans ses allées quelque 500 000 à 600 000 visiteurs et, cette année, tous les candidats à l’élection présidentielle qui viendront présenter leurs propositions pour conforter la France comme premier pays producteur agricole de l’Union européenne et pour soutenir des filières qui sont à l’aube d’une nouvelle révolution.
Des révolutions, l’agriculture française en a justement beaucoup connu par le passé. Au XVIIIe siècle, c’est la première révolution agricole, basée sur la suppression de la jachère et une meilleure articulation entre élevages et cultures. Au XIXe siècle, c’est la révolution industrielle qui va mécaniser l’agriculture ; c’est aussi l’apparition des premiers engrais chimiques. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, c’est la révolution de l’agriculture intensive nécessaire pour nourrir les citoyens : la mécanisation, l’usage d’engrais, de pesticides, la recherche de nouvelles variétés s’accélèrent. Puis au XXe siècle, c’est la révolution de la mondialisation des échanges mais aussi celle de nouvelles façons de produire, OGM d’un côté, filière bio de l’autre. C’est aussi le défi de surmonter des épizooties comme la vache folle et de répondre aux exigences du public de plus en plus sensible à sa propre santé comme à l’état de l’environnement et au bien-être animal.
Toutes ces révolutions, l’agriculture française a su s’y adapter, parfois dans la colère de manifestations contre des décisions nationales ou européennes, parfois dans la douleur lorsque de petits exploitants dans la difficulté ont été acculés au suicide ou lorsqu’ils ont essuyé un insupportable agribashing, mais aussi dans la joie de voir les produits made in France reconnus dans le monde entier pour leur qualité.
Aujourd’hui, l’agriculture va devoir relever ce qui est peut-être son plus grand défi : le défi climatique. Le réchauffement du climat sur la planète va, en effet, bouleverser des équilibres que l’on croyait intangibles : la hausse des températures, mesurée depuis un demi-siècle n’est hélas pas terminée et les agriculteurs vont devoir faire face à des événements météorologiques difficiles, entre sécheresses plus intenses ou phénomènes cévenols plus soudains et violents.
Relever cet immense défi va passer par un changement de cultures dans certaines régions, par de nouvelles pratiques, par l’utilisation d’innovations numériques entre imagerie satellite et intelligence artificielle, robots agricoles et traçage des produits par la blockchain. La « French AgriTech » et ses plus de 200 start-up sont prêtes. Mais c’est bien toute la société qui doit se mettre en mouvement aux côtés des agriculteurs pour cette révolution qui vient.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 21 février 2022)