Cinq jours après l'attaque terroriste au cœur de la préfecture de police de Paris, qui s'est soldée par la mort de quatre fonctionnaires, la journée d'hier a été particulièrement importante car elle a opéré comme une remise à niveau indispensable après cette terrible affaire.
C'est d'abord une remise à niveau humaine. Depuis l'attaque de jeudi, en effet, l'emballement médiatique et politique autour de l'enquête et de la recherche des responsabilités – au premier rang desquelles celles du ministre de l'intérieur Christophe Castaner – avait comme effacé la réalité première de ces assassinats : c'est-à-dire la mort de quatre policiers dans l'exercice de leur fonction. Trois hommes et une femme qui étaient passionnés par leur travail, qui avaient à cœur de servir et protéger leur pays et les citoyens qui le composent ; qui étaient aussi des compagnons, compagne et parents aimants qui, aujourd'hui, laissent leurs proches dans la douleur. Il était plus que temps que l'on rende hommage à Anthony, Aurélia, Brice et Damien.
Et il était éminemment logique que cela se concrétise, au-delà d'une remise de Légion d'honneur à titre posthume, par un hommage national solennel présidé par Emmanuel Macron.
Ensuite, il s'agira pour l'Etat de remettre à niveau le dispositif de lutte contre le terrorisme. Car cette affaire au cœur de l'appareil sécuritaire de la France a mis en lumière des « failles », des « dysfonctionnements » aussi gravissimes qu'inimaginables. Comment le tueur a-t-il pu passer inaperçu au sein de la direction du renseignement, chargée de traquer les terroristes ? Sa radicalisation aurait-elle pu et dû être détectée ? Pourquoi les signaux faibles qui avaient été constatés n'ont débouché sur aucune suite ? Quelles données sensibles cet informaticien accrédité Secret-défense a-t-il pu consulter et peut-être transmettre à quelque cellule jihadiste ?
L'enquête devra répondre à toutes ces questions mais, au-delà, c'est bien toute l'architecture de l'antiterrorisme qu'il faudra peut-être revoir. « Resserrer les mailles du filet » comme le promet le Premier ministre Edouard Philippe est un premier pas, mais il faudra peut-être s'interroger sur le tissage du filet lui-même…
Enfin, la dernière remise à niveau qu'a impulsé la journée d'hier concerne la société tout entière face au terrorisme. Certains se sont étonnés du ton très fort, voire martial, du discours d'Emmanuel Macron hier. Mais le chef de l'Etat a eu raison d'appeler chacun, sans verser dans le soupçon permanent, à être plus vigilant, peut-être plus conscient de la menace de « l'hydre islamique » et du combat qu'il faut lui livrer. Car quatre ans après les attentas de Charlie Hebdo ou du Bataclan, trois ans après la tuerie de la promenade des Anglais à Nice, la France reste toujours sous la menace diffuse de Daech. Une épée de Damoclès dont nous protègent tous les jours des Anthony, Aurélia, Brice et Damien…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 9 octobre 2019)