Y aura-t-il des jouets à Nöel ? Voilà bien l’angoissante question qui commence à saisir les parents à peine sortis du marathon de la rentrée scolaire de leur progéniture. À trois mois de l’échéance, cette préoccupation pourrait naturellement faire sourire de prime abord, même si – tout le monde en convient lorsqu’il convoque ses souvenirs d’enfance – les cadeaux de Noël sont l’un des rendez-vous les plus importants pour les bambins et qu’on ne saurait le traiter à la légère.
Mais derrière cette question se trouve aussi l’illustration parfaite de ce qu’est l’économie mondialisée… et de ses limites. Des jouets imaginés en Europe ou aux Etats-Unis, par exemple, puis produits à coût serré en Chine, le pays-usine de la planète, et enfin acheminés par container dans le monde entier jusqu’à la grande surface spécialisée ou non, le magasin de jouets près de chez soi, ou l’un des entrepôts des plateformes de vente en ligne. Jusqu’à présent, cette chaîne logistique était une belle mécanique bien huilée dans laquelle tout le monde y trouvait son compte. Il aura fallu un coronavirus et une pandémie mondiale pour en perturber le bon fonctionnement.
Production à l’étiage durant les confinements, et désormais ports toujours perturbés par l’épidémie, le variant Delta sévissant sévèrement en Asie. Résultat : les commandes de jouets ont le plus grand mal à être entièrement honorées, puis rencontrent de multiples obstacles pour être livrées et livrées à temps. La pénurie guette et la rareté conduit à une hausse des prix, CQFD…
Comme pour les masques chirurgicaux au début de l’épidémie, comme pour les matériaux de construction, les puces électroniques, les constructeurs automobiles ou certains médicaments, l’Europe touche du doigt ce qu’il en coûte d’avoir délocalisé la production industrielle dans des secteurs stratégiques mais aussi dans ceux qui le sont moins mais font notre quotidien.
Le Covid-19, par ses conséquences sur les économies partout dans le monde, aura au moins eu le mérite de rouvrir le débat sur la question de la souveraineté industrielle. Une souveraineté qu’il convient sans doute de réinventer entre incontournable ouverture au monde et nécessaire réindustrialisation.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 25 septembre 2021)