Accéder au contenu principal

Les paradoxes de la relance

 

tirelire

La présentation du plan de relance, concocté par l’exécutif, se déroulera donc enfin ce jeudi, après avoir été décalée d’une semaine en raison de la hausse des cas de contamination au coronavirus et d’une rentrée scolaire qui nécessitait, à l’évidence, des précisions. Un décalage somme toute mineur, car le plan de relance est, dans ses grandes lignes, déjà connu, le gouvernement ayant égrainé au fil des semaines le montant des aides qu’il va débloquer et les secteurs qui seront aidés à compter de début 2021. Ce plan de 100 milliards d’euros – du jamais vu ! – veut relancer l’activité économique alors que le PIB de la France a connu une baisse historique de 13,8 % au deuxième trimestre et que le taux de chômage a bondi depuis le confinement. Partiellement financé par l’Europe, il doit répondre à la plus grave crise depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Souveraineté économique, transition écologique, relocalisations, solidarité avec les jeunes : c’est une ambitieuse feuille de route que dessine le gouvernement, celle du "monde d’après", telle que fixée par Emmanuel Macron. Le Président, qui assurait, en effet, dès le 16 mars que "le jour d’après, quand nous aurons gagné, ce ne sera pas un retour au jour d’avant" et qui promettait même de se "réinventer", a bien mesuré qu’après trois ans de réformes libérales, le besoin des Français d’être davantage protégés par un Etat providence s’était manifesté avec force durant le confinement.

Ce plan de relance, porté par un nouveau Premier ministre s’affichant comme l’homme des "territoires" et censé concrétiser ce nouvel état d’esprit, ne manque toutefois pas de paradoxes, un sur fond, l’autre sur la forme.

Alors que d’habitude, une relance est une politique centrée sur la demande pour relancer la consommation en berne, l’exécutif a fait le choix d’une politique de l’offre et notamment d’une baisse significative de la fiscalité des entreprises, les fameux "impôts sur la production" dont la suppression est une revendication de longue date du patronat. Emmanuel Macron reste ainsi fidèle au credo de la théorie du ruissellement.

Le second paradoxe est davantage sur la forme. Pour mettre en musique ce plan de relance qui doit "préparer la France de 2030", selon son expression, Emmanuel Macron va nommer comme haut-commissaire au Plan François Bayrou, malgré sa mise en examen dans l’affaire des assistants européens du MoDem. Autant dire que pour penser le "monde d’après", le chef de l’Etat a choisi une figure du "monde d’avant", son principal allié politique. Surtout, à l’heure où l’on parle de simplification administrative, la mise en œuvre effective du plan de relance à l’échelon local sera conduite par de nouveaux sous-préfets à la transformation et à la relance chargés de faire remonter au gouvernement "tous les blocages administratifs." On a connu plus simple.

Ces deux paradoxes révèlent en tout cas combien le plan de relance économique est éminemment politique : il doit ouvrir la dernière séquence du quinquennat sur de nouveaux sujets, sans renier les premières années de réformes. Autant dire que ce plan de relance est aussi un plan de relance… du quinquennat. Un difficile exercice d’équilibrisme dont le succès ou l’échec pèsera sur une nouvelle candidature d’Emmanuel Macron en 2022.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 3 septembre 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Entaché

Dix ans après son départ du gouvernement Ayrault, Jérôme Cahuzac, l’ancien ministre du Budget de François Hollande, envisage-t-il son retour en politique ? En tout cas l’intéressé, condamné en appel à deux ans de prison pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale, et frappé de cinq années d’inéligibilité, était hier sur le marché de Monsempron-Libos, non loin de Villeneuve-sur-Lot, la ville dont il a été le député et le maire.Fin octobre déjà il participait à une réunion, organisée à huis clos, quelques semaines après le lancement d’une association politique «Les amis de Jérôme Cahuzac». Récemment interrogé par Sud-Ouest pour savoir s’il préparait son retour politique, le septuagénaire, qui avait élu domicile en Corse où il pratiquait la médecine à l’hôpital de Bonifacio, s’est borné à répondre que «tout est une question de circonstances», faisant remarquer qu’ «on fait de la politique pour être élu et agir» et qu’il n’y avait pas d’élections avant 2026, date des prochaines m

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparation po

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu