Accéder au contenu principal

Prévisions et solidarité

orage


Les récentes intempéries qui ont frappé les vignes et les cultures il y a quelques jours, notamment dans le Sud-Ouest, montrent combien les aléas climatiques sont devenus, aujourd'hui peut-être plus encore que par le passé, un élément clé pour les agriculteurs. Des aléas désormais musclés par un réchauffement – ou plutôt un dérèglement – climatique qui joue avec les nerfs des producteurs, provoquant, au fil des saisons, là des sécheresses, ici des inondations, ailleurs des orages de grêle ou des vagues de gel. Des phénomènes météo très intenses et parfois très localisés, qui détruisent tout ou partie des cultures et qu'il reste parfois difficile à prévoir.

Et pourtant, c'est bien la prévision, l'anticipation de ces phénomènes qui est au cœur des préoccupations des agriculteurs. De la sélection de la variété de semences aux méthodes d'irrigation en passant par le choix des traitements phytosanitaires ou agrobiologiques, la majorité des tâches agricoles est régie par les conditions météo, dont le suivi reste pour les paysans un indicateur capital pour assurer le développement de leurs cultures. Un indicateur qui, heureusement, se perfectionne. On est loin des oracles de l'Antiquité où l'on observait simplement le ciel et, selon l'expression d'Homère, on cherchait à « apprendre les projets de Zeus d'après la haute cime des chênes. »

L'agriculture moderne s'est mariée avec la technologie de pointe qui va des satellites de Météo France aux prévisions multimodèles pour les températures, jusqu'aux smartphones des agriculteurs sur lesquels ils reçoivent, avant un épisode violent, des alertes leur permettant de déployer quand cela est possible des protections au bon moment. La surveillance de la météo et plus particulièrement de la pluviométrie, via de petites stations perfectionnées dans les exploitations, permet aussi de mieux gérer les besoins hydriques des plantes.

Mais toute cette technologie, qui ne cesse de s'améliorer au service d'une agriculture de précision, ne peut pas tout. Le risque zéro n'existe pas avec la nature. À côté des outils de prévision, il faut donc des outils d'assurance. Si la protection de l'agriculture contre les risques climatiques relève du secteur privé avec des assurances multirisques climatiques sur lesquelles planche actuellement un groupe de travail gouvernemental pour en adapter la fiscalité, les aléas non assurables doivent faire jouer la solidarité nationale.

Parce qu'au bout de la chaîne, les dégâts des intempéries ont une incidence sur le prix des produits qu'achètent tous les Français sur les marchés ; parce que les agriculteurs qui ont perdu le fruit d'un travail parfois insuffisamment rémunéré méritent assistance ; enfin parce que la France est le premier pays producteur agricole de l'Union européenne et donc son moteur qu'il faut préserver.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du 9 juin 2018)

Posts les plus consultés de ce blog

Se préparer

Voilà un type de courbe que l’on n’avait pas vu depuis longtemps concernant le Covid-19 : une hausse, celle du nouveau variant du coronavirus EG.5. Baptisé Eris, ce cousin d’Omicron croît de façon vertigineuse dans le séquençage de cas positifs au Covid-19 en France comme dans d’autres pays. Beaucoup plus contagieux que ses prédécesseurs, Eris pourrait ainsi s’imposer et devenir majoritaire. Au point de relancer une pandémie mondiale que nous pensions derrière nous ? Nous n’en sommes évidemment pas là, mais l’apparition de ce nouveau variant, tout comme la possibilité de voir survenir des clusters de contamination comme cela vient de se produire aux fêtes de Bayonne, nous interroge légitimement. Même si la couverture vaccinale est bonne en France, la crainte de devoir revivre les conséquences sanitaires et socio-économiques d’un retour de la pandémie est bien dans les esprits. Peut-être aurions-nous dû écouter plus attentivement les spécialistes comme le directeur général de l’Organisa

Moine-soldat

Dans le marathon de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le calendrier a marqué une pause ce jeudi à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste. Une pause mise à profit par le gouvernement pour aller sur le terrain défendre une réforme toujours massivement rejetée par 7 Français sur 10. À l’avant-veille de la quatrième journée de manifestation appelée par l’intersyndicale, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont ainsi rendus hier à Neuville-en-Ferrain, dans le Nord, Olivier Dussopt à Toulouse, où il a notamment rencontré six lecteurs de La Dépêche du Midi au siège de notre journal pour répondre à leurs questions et leurs inquiétudes. Celui qui enchaîne à un rythme soutenu les interviews dans les matinales et défend depuis lundi son texte devant une Assemblée nationale survoltée s’est montré tel qu’en lui-même : un moine-soldat de la macronie. Moine, parce que le ministre connaît sur le bout des doigts le catéchisme de la réforme, son dogme du r

L'indécence et la dignité

C’est sans doute parce qu’elle avait le souriant visage de l’enfance, cheveux blonds et yeux bleus, parce qu’elle aurait pu être notre fille ou notre nièce, notre petite sœur ou notre cousine, une camarade ou la petite voisine. C’est pour toutes ces raisons que le meurtre barbare de la petite Lola a ému à ce point la France. Voir le destin tragique de cette bientôt adolescente qui avait la vie devant elle basculer à 12 ans dans l’horreur inimaginable d’un crime gratuit a soulevé le cœur de chacune et chacun d’entre nous. Et nous avons tous pensé à ses parents, à sa famille, à ses proches, à ses camarades de classe, à leur incommensurable douleur que notre solidarité bienveillante réconfortera mais n’éteindra pas. Tous ? Non, hélas. Dans les heures qui ont suivi le drame, certains ont instrumentalisé de façon odieuse la mort de cette enfant pour une basse récupération politique au prétexte que la suspecte du meurtre était de nationalité étrangère et visée par une obligation de quitter l