La baisse des températures des derniers jours après une rentrée très douce va replonger les Français dans l’épineuse question du chauffage de leur logement. Épineuse parce que le coût de l’énergie, qui pesait déjà beaucoup dans le budget des ménages, a bondi ces derniers mois, particulièrement depuis la guerre en Ukraine qui a déstabilisé le marché du gaz, entraînant avec lui celui de l’électricité qui lui est encore lié. Les deux énergies sont, en effet, les plus utilisées pour chauffer les logements français, à hauteur de 41 % pour le gaz naturel et de 37 % pour l’électricité, selon les derniers chiffres clé 2022 du logement publiés par l’Insee.
La fin progressive du bouclier tarifaire gouvernemental d'ici 2025, qui limitait la hausse du prix de l’électricité et du gaz à 15 %, la perspective de nouvelles hausses début 2024, les conséquences encore inconnues du nouveau conflit ouvert entre Israël et le Hamas, la possibilité d’un nouveau choc pétrolier évoqué par les experts de l’Agence internationale de l’énergie : tout cela est source d’inquiétude et de questionnement.
Quel mode de chauffage choisir ? Quel est celui qui a le meilleur rendement ? Celui qui reçoit le plus d’aides pour son financement et son installation ? Celui qui est aussi le plus éco-responsable, une donnée à laquelle les Français sont de plus en plus sensibles ? Gaz, électricité, bois, granulés… ? Le chauffage est devenu un vrai casse-tête surtout quand circulent sur le marché quelques arnaques et quelques escrocs.
Le chauffage est aussi le marqueur de profondes inégalités et d’une précarité insupportable. Dans sa note sur la part des personnes en situation de privation matérielle et sociale, publiée en juillet dernier, l’Insee note que « parmi l’ensemble des difficultés déclarées, celle liée au chauffage du logement est en forte augmentation : début 2022, 10 % des personnes vivent dans un ménage qui n’a pas les moyens financiers de chauffer correctement son logement, contre 5 à 7 % entre 2014 et 2021. » Une situation qui est aggravée dans les zones rurales, où le fioul est encore très utilisé. Et si les Français ont adopté dans leur grande majorité des gestes de sobriété en chauffant leur logement à 19 °C, d’autres ont été contraints à ne plus se chauffer. 62 % des Français ont ainsi renoncé à chauffer correctement leur logement et 60 % ont réduit leur consommation d’eau chaude selon un sondage Odoxa paru ce mois-ci.
Derrière le coût des énergies pour se chauffer se pose aussi la question de l’isolement des logements. La France compte entre 5,2 millions de passoires thermiques, selon le ministère en charge du Logement, et 7 à 8 millions selon la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim). Les logements notés F et G au titre du diagnostic de performance énergétique représentent ainsi plus de 17 % du parc des résidences principales…
S’attaquer à ce problème devrait faire consensus et déclencher un véritable plan Marshall de la rénovation énergétique qui aille bien au-delà des aides existantes – encore trop mesurées, trop complexes et trop restrictives – afin que chaque Français puisse correctement se chauffer.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 26 octobre 2023)