Au lendemain des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, ce sont plus que jamais deux Amériques qui se font face, deux visions de la société que l'on pourrait dire irréconciliables. Car en dépit des fanfaronnades habituelles de Donald Trump saluant pour son camp « un immense succès », républicains et démocrates, dont les électeurs se sont massivement mobilisés mardi, sortent déçus de ce scrutin qui les contraint à une classique cohabitation.
Les démocrates peuvent certes se féliciter d'avoir reconquis la Chambre des représentants, une première depuis huit ans. Et Nancy Pelosi, leader de la nouvelle majorité, peut assurer que la Chambre qui s'installera en janvier sera un contre-pouvoir réel à la politique de Donald Trump. Mais les démocrates s'attendaient sans doute à quelques victoires plus spectaculaires et vont devoir éviter toute «persécution» à l'égard d'un Donald Trump qui pourrait en tirer électoralement bénéfice. Sans compter qu'à deux ans de la présidentielle, un long travail de reconstruction idéologique attend toujours un parti très divisé, sans ligne politique claire. Et la recherche d'un leader qui puisse succéder à Barack Obama semble toujours aussi complexe.
Les républicains peuvent de leur côté se satisfaire d'avoir limité la casse. Sans vague bleue démocrate, ils conservent le Sénat, y progressent même. Donald Trump, qui a incontestablement pris l'ascendant dans son parti, est ainsi assuré de pouvoir continuer sa politique internationale de sanctions contre l'Iran et ses bras de fer commerciaux avec la Chine et l'Europe ; et aussi de pouvoir nommer sans obstacles des juges fédéraux ultraconservateurs. Mais les bâtons que vont mettre les démocrates dans les roues de sa politique peuvent être une réelle difficulté pour Donald Trump, qui a besoin d'un bilan pour se représenter.
Pour éviter que cette cohabitation ne débouche sur une paralysie totale du pays, chaque camp va devoir faire des concessions, retrouver le sens de l'intérêt général dans une Amérique plus divisée que jamais, marquée par une polarisation qui laisse peu de place aux positions modérées. Acculé à devoir coopérer, Donald Trump qui n'aime rien tant que décider seul sera-t-il capable de transiger ?
(Commentaire publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 8 novembre 2018)