Une inflation qui a continué d’augmenter en France en avril à +5,9 % sur un an selon la dernière note de l’Institut de la statistique et des études économiques (Insee), note qui sera affinée le 12 mai prochain. Et surtout des prix dans l’alimentaire qui ne sont toujours pas orientés à la baisse avec +14,9 % sur un an en avril (contre +15,9 % en mars), +10,2 % sur les produits frais et +15,8 % sur les autres produits alimentaires. Confrontés à ce « jour sans fin » où les prix, depuis le début de la guerre en Ukraine le 24 février 2022, ne cessent de gonfler, les Français ont de plus en plus de mal à boucler leurs fins de mois et usent de toutes les astuces pour tenter de faire baisser leur budget courses. Promotions des grandes enseignes qui rivalisent entre elles d’inventivité, points fidélités soigneusement accumulés pour alléger la fin de mois, choix des marques distributeurs moins chères que les grandes marques, etc. Mais cela ne suffit pas et certains tombent dans le vol des produits pour tout simplement manger pour vivre. Terrible situation de voir des magasins contraints de mettre des antivols jusque sur des boîtes de sardines comme La Dépêche le racontait samedi dernier.
Dans l’immédiat rien ne semble devoir freiner cette hausse des prix – qui frappe d’ailleurs tous les pays européens – d’ici l’été, d’autant plus que les grandes enseignes vont progressivement appliquer les hausses de prix négociées avec les industriels. Ces derniers ont, en effet, obtenu +10 % en moyenne lors des négociations annuelles qui se sont achevées le 1er mars. Autant dire que d’ici juillet certains prix bondiront jusqu’à +20 ou +25 %. Intenable pour les Français et intenable aussi pour le gouvernement qui sent bien qu’après la réforme des retraites – toujours aussi massivement rejetée – la colère gronde contre ces hausses de prix dans l’alimentaire désormais injustifiables puisque la baisse des matières premières ne se répercute pas sur le prix final.
Pour calmer les esprits, tous les ministres montent au créneau pour afficher leur détermination et leur espoir, quitte à trop user de méthode Coué sur l’air d’ «après la pluie vient le beau temps ». La ministre du Commerce Olivia Grégoire veut croire qu’il y aura « une baisse visible des prix » en septembre, la Première ministre Elisabeth Borne espère « des baisses concrètes, tangibles » des prix « d’ici la fin du mois de juin ». Pour l’heure des vœux pieux, car le nœud du problème tient dans la réouverture des négociations entre distributeurs et industriels. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire pousse les industriels dans ce sens. Il leur a écrit et va les convoquer la semaine prochaine à Bercy, mais n’a guère de moyen de pression sur ces grands groupes. « Il faut que les industriels participent à la baisse des prix » martèle-t-il. Les industriels ne sont pas opposés à faire des efforts mais ils ont d’ores et déjà écarté toute renégociation générale.
Seul un changement de la loi instituant des négociations en temps réel toute l'année pourrait changer la donne. Pour l’heure, le gouvernement, qui a renoncé au chèque alimentaire, ne peut que prolonger son « trimestre anti-inflation » aux effets insuffisants. Et en se gardant de promettre l’impossible, il ne peut que croiser les doigts pour qu’arrive une baisse non pas des prix mais de la hausse des prix…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 4 mai 2023)