Accéder au contenu principal

Derrière l'uniforme

 police


La pandémie de Covid-19, qui avait imposé confinements et télétravail, s’était soldée par le phénomène de la grande démission : des salariés, souvent des cadres, qui remettaient complètement à jour leur rapport au travail et quittaient leur emploi pour changer de vie. La police et la gendarmerie nationales connaissent, elles aussi, une grande démission, mais bien plus subie que choisie et bien loin du changement idyllique vanté outre-Atlantique.

Policiers et gendarmes – mais aussi agents de l’administration pénitentiaire – décident de quitter leur métier qui, pour beaucoup, était pourtant une véritable vocation et un sacerdoce au service des Français et de l’intérêt général. Le nombre de départs a ainsi augmenté de 33 % en quatre ans chez les policiers, de 25 % chez les gendarmes. Une grande démission, mais une démission silencieuse qui passerait presque inaperçue sans un rapport de la Cour des comptes qui tire la sonnette d’alarme ici ou, là, des témoignages poignants d’ex-policiers et gendarmes qui expliquent les raisons de leur départ et leur reconversion parfois très éloignée de l’univers des forces de l’ordre.

Pour contrer cette grande démission et vu les besoins à venir pour la Coupe du monde de rugby cette année ou les Jeux olympiques de Paris en 2024, les recrutements dans la police et la gendarmerie ont été augmentés, avec parfois une exigence revue à la baisse sur les qualités requises des candidats et ensuite des formations moins complètes qu’autrefois.

Mais ces recrutements ne semblent pas freiner le nombre de départs, qui illustrent une crise qui devrait interroger la société.

Le manque de respect aux représentants de l’État, verbalement ou physiquement lorsque des barrages routiers sont forcés avec des conséquences parfois mortelles, les insultes et les menaces récurrentes jetées à la figure de ces hommes et de ces femmes et parfois de leur famille, les risques toujours plus grands en intervention, mais aussi la pression de la hiérarchie sur les services, la politique du chiffre imposée par la place Beauvau au gré de l’actualité et des ambitions politiques d’un ministre obnubilé par sa présence médiatique, les critiques récurrentes mais légitimes sur les violences policières – qui existent mais restent heureusement minoritaires – les ordres et contre-ordres au nom d’une stratégie de maintien de l’ordre qui, d’évidence, on l’a vu lors du mouvement des Gilets jaunes ou des dernières manifestations, est à revoir : tout cela pèse sur le moral des policiers et des gendarmes qui sont, on l’oublie un peu trop, des hommes et des femmes, des pères et des mères, des sœurs et des frères, des fils et des filles derrière leur uniforme, qui aspirent sans doute davantage à être gardiens de la paix que gestionnaires de tous les maux de la société.

Les départs des policiers et gendarmes font aussi écho à d’autres démissions parmi les fonctionnaires, par exemple les enseignants, les pompiers ou les soignants. Il serait temps de prendre à bras-le-corps le malaise de tous ces fonctionnaires car sans eux, comment tiendrait la République ?

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 15 mai 2023)

Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...