Accéder au contenu principal

Réparer l'Amérique

biden

La tâche qui attend Joe Biden, investi aujourd’hui à midi comme 46e président des Etats-Unis dans un Washington bunkérisé, est immense. Après les quatre années de bruit et de fureur de la présidence du républicain populiste Donald Trump, l’ancien vice-président de Barack Obama a pour mission de réparer une Amérique qui n’a jamais été aussi divisée, polarisée, abîmée. Après quatre années de tweets en majuscules, d’outrances, d’invectives, de fake news, de mensonges éhontés de la part du milliardaire qui n’a pas concédé sa défaite, qui affirme toujours sans preuve que l’élection lui a été volée et qui a chauffé à blanc ses partisans, les incitant à envahir le Capitole, temple de la démocratie, Joe Biden va devoir réconcilier ses concitoyens mais aussi réconcilier l’Amérique avec le monde.

Le natif de Scranton (Pennsylvanie) n’a ni le charisme d’un Obama, ni la jeunesse d’un Kennedy, ni l’aura d’un Roosevelt. Mais Joe Biden, qui se présente en normal guy proche des gens, a pour lui une vie marquée par les épreuves, une longue expérience parlementaire dont il est ressorti maître dans l’art de bâtir des compromis, une empathie et un sens de l’intérêt général qui ont tant fait défaut à son prédécesseur, une vice-présidente, Kamala Harris, sur laquelle il va pouvoir compter et une majorité, fragile mais réelle, au Congrès.

Autant d’atouts qui vont lui permettre d’agir dès demain, avec une administration, féministe, inclusive, dont il a minutieusement choisi les nominations avec des personnalités aux compétences incontestables.

Gestion de la crise sanitaire qui fait des Etats-Unis le pays le plus endeuillé au monde, plan de relance massif de l’économie et en faveur des millions d’Américains précipités dans la pauvreté, lutte contre le réchauffement climatique, prise en compte des minorités… et aussi des attentes de ceux qui ont voté Trump : les dossiers qui attendent le président Biden sont aussi cruciaux que nombreux. Et il va devoir rapidement obtenir des résultats.

Sur le plan international, Joe Biden, favorable au multilatéralisme, bénéficie d’un a priori positif, en tout cas dans les démocraties occidentales, qui voient en lui l’artisan d’un retour à la normale… qui ne sera toutefois pas un retour à la période Obama. Car ne nous y trompons pas : si Trump s’enferrait dans une Amérique isolée, Biden – comme ses prédécesseurs démocrates ou républicains – fera toujours passer l’Amérique d’abord.

La France – qui partage avec les Etats-Unis un même dessein universaliste – et l’Union européenne ne doivent pas être naïves, mais au contraire profiter de la présidence Biden pour mieux s’affirmer dans un monde dont l’épicentre géopolitique et économique bascule désormais de plus en plus vers la Chine et l’Asie du sud-est.

(Editorial publié dans La Dépêche du mercredi 20 janvier 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...

La messe est dite ?

    L’entourage de François Bayrou a beau tenter d’expliquer que l’échec du conclave sur les retraites n’est imputable qu’aux seuls partenaires sociaux qui n’ont pas réussi à s’entendre en quatre mois pour « améliorer » la contestée réforme des retraites de 2023, la ficelle est un peu grosse. Car, bien évidemment, cet échec – hélas attendu – est aussi celui du Premier ministre. D’abord parce que c’est lui qui a imaginé et convoqué cette instance inédite de dialogue social et qu’il aurait naturellement revendiqué comme le succès de sa méthode un accord s’il y en avait eu un. Ensuite parce qu’il n’a pas été l’observateur neutre des discussions, qu’il promettait « sans totem ni tabou ». Il a au contraire, plusieurs fois, interféré : dès leur lancement en les corsetant par une lettre de cadrage imposant de ne pas créer de dépenses et d’équilibrer les comptes à l’horizon 2030 ; ensuite par son refus de voir abordé l’âge de départ à 64 ans, point centra...

Fragilités

Les images que les Français ont découvertes cette semaine à l’occasion des violentes intempéries qui ont frappé le Sud-Ouest étaient spectaculaires : un TGV comme suspendu dans le vide, reposant sur des rails sous lesquels le ballast a été emporté par des flots déchaînés. Inouï comme le nom du train qui transportait quelque 500 passagers qui se souviendront longtemps de leur voyage et de leur évacuation en pleine nuit à Tonneins – parfaitement maîtrisée par les secours, les personnels de la SNCF et les agents de la ville. Le jour d’après, à l’issue du remorquage du TGV, avait des allures de gueule de bois pour tout le monde devant les dégâts considérables sur la voie de chemin de fer. 200 mètres sont complètement à refaire, les pluies torrentielles ayant emporté la terre du remblai, la sous-couche et le ballast. Et si les travaux ont commencé dès après les orages, ils vont être longs, bloquant la liaison entre Toulouse et Bordeaux. La SNCF mise sur une reprise du trafic entre le me...