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La bataille de l’opinion

 

vaccin

Dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19, l’humanité a remporté une première bataille : celle de trouver des vaccins en un temps record. Là où il faut habituellement plusieurs années pour mettre au point un vaccin, les scientifiques du monde entier ont réalisé des prouesses grâce à une mobilisation et une collaboration internationales exceptionnelles pour livrer en un an plusieurs vaccins. Qu’ils utilisent des techniques traditionnelles ou la nouvelle méthode de l’ARN messager – méthode étudiée toutefois depuis plus de dix ans – ces vaccins, dont les homologations ont respecté tous les protocoles de sécurité, notamment en Europe et donc en France, constituent aujourd’hui la seule arme dont nous disposons pour sortir de cette pandémie qui a mis le monde à genoux.

Mais il reste encore la seconde bataille à mener : celle de l’opinion. Si la rapidité de mise au point des vaccins peut susciter de légitimes questions pour lesquelles les autorités peuvent apporter des réponses claires, des faits parfaitement étayés scientifiquement, elle a aussi provoqué un torrent de fake news et de rumeurs qui, aujourd’hui, menacent la réussite des campagnes de vaccination. Cela, hélas, est plus vrai encore en France que dans d’autres pays. C’est dans la patrie de Louis Pasteur que la défiance envers le vaccin, attisée par des groupes antivax complotistes qui agissent sans aucun obstacle sur des réseaux sociaux complaisants, atteint, en effet, des sommets. Selon un sondage Ipsos Global Advisor publié mardi, seuls quatre Français sur dix souhaitent se faire vacciner contre la Covid-19, faisant de la France la « championne du monde » des pays réfractaires, devant la Russie et l’Afrique du Sud.

Pour le gouvernement, la réussite de la campagne de vaccination passe dès lors par un préalable : rétablir à tout prix la confiance dans le vaccin. Déjà accusé de vouloir imposer une « dictature sanitaire » avec des mesures de restrictions pourtant prises dans d’autres pays, handicapé par de nombreux couacs commis depuis le début de l’épidémie (sur les masques ou les tests), l’exécutif a fait le choix de se donner le temps de convaincre, afin notamment de pouvoir recueillir le consentement éclairé des Français pour leur vaccination non obligatoire. Dès lors, en une semaine, quelques dizaines seulement de Français ont été vaccinées contre plusieurs milliers chez nos voisins qui ont commencé en même temps que nous. Cette lenteur est assumée par le gouvernement mais elle relève du pari risqué. Est-il pertinent, pour rassurer les défiants, de finir par inquiéter les confiants ? Et surtout est-ce une bonne stratégie à l’heure où une troisième vague nous menace ? Le généticien Axel Kahn ou l’Académie de médecine ont déploré une trop grande prudence tandis que près de 200 maires se sont dits prêts à se faire vacciner pour montrer l’exemple, comme Joe Biden a pu le faire aux Etats-Unis. Face à la pression, Olivier Véran a décidé jeudi soir d’ouvrir la vaccination aux soignants de 50 ans et plus dès ce lundi et promis que la campagne vaccinale « va bientôt prendre de l’ampleur »…

« Nous sommes le pays des Lumières et de Pasteur, la raison et la science doivent nous guider », assurait Emmanuel Macron au démarrage de la campagne vaccinale. Il est urgent de passer de la parole aux actes.

(Editorial publié dans La Dépêche lundi 4 janvier 2020)

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