Monsieur Paul avait donc raison. Paul Bocuse, le pape de la cuisine française qui vient de nous quitter était dans le vrai, lui qui a été l’un des premiers à tout miser sur le produit, l’aliment frais et authentique, afin de donner ses lettres de noblesse à la gastronomie traditionnelle. L’étude française publiée jeudi 15 février dans la revue médicale britannique British Medical Journal (BMJ) vient de valider cette vision du bien manger.
Certes, depuis longtemps on savait que manger trop souvent des produits transformés par l’industrie agro-alimentaire pouvait être néfaste pour la santé. Trop gras, trop sucrés ou trop salés, ils peuvent provoquer obésité, cholestérol ou maladies cardio-vasculaires… Certes depuis le scandale des lasagnes à la viande de cheval, on avait découvert que l’industrie agro-alimentaire usait – et abusait – de «minerais» de viandes vendus sur un marché mondial aussi complexe qu’opaque.
L’étude française pousse notre effroi dans ses retranchements en démontrant, cette fois, un lien entre la consommation des aliments ultra-transformés (AUT) et le sur-risque de cancer. Ces AUT – de la barre chocolatée aux soupes déshydratées – gavés de colorants, d’édulcorants ou d’émulsifiants représentant entre 25% et 50% de notre alimentation totale, il y a là un enjeu majeur de santé publique mais aussi un enjeu politique plus large.
Car si ces produits sont prisés, c’est aussi parce que leur prix de vente est davantage accessible aux Français les plus modestes, que leur praticité correspond à des rythmes de vie bousculés par l’évolution du travail. Pour que chacun puisse, comme Paul Bocuse, retourner aux fourneaux et cuisiner des produits frais non transformés, qui plus est achetés au juste prix aux producteurs, il est urgent d’approfondir notre réflexion sur le modèle alimentaire que nous voulons. Les récents États généraux de l’alimentation ont esquissé le sujet, il reste à l’approfondir.
(Billet publié dans La Dépêche du Midi du samedi 17 février 2018)