Il y a un peu plus de 50 ans, dans un monde occidental corseté par les conservatismes et les interdits et plus particulièrement dans une Amérique patriarcale et matérialiste, sûre de ses valeurs face au bloc soviétique mais pratiquant la ségrégation raciale, et qui allait s’enliser dans la guerre du Vietnam, naissait un mouvement totalement inédit : celui des hippies. « Peace and love », paix et amour proclamaient les jeunes gens d’une génération éprise de liberté et d’émancipation individuelle et collective, abhorrant la guerre, avide de nouvelles expériences, de libération sexuelle, de lectures puissantes et de nouvelles musiques. Bref d’un nouveau monde.
Cette révolution du « flower power » née aux Etats-Unis, cette idée qu’une autre société était possible – et souhaitable – allait essaimer partout dans le monde, entraînant avec elle toute une jeunesse en pantalon patte d’éléphant, chemise à fleurs et cheveux longs, de WoodStock à Mai-68, des plateaux de Katmandou à ceux du Larzac, des vallées de l’Ariège aux plages d’Ibiza, des communautés aux bancs des universités.
La fin de la guerre du Vietnam en 1975 correspondit au déclin du mouvement qui a vu sa contre-culture finalement avalée par un système économique capitaliste toujours prompt à recycler ce qui fait le succès de l’air du temps. Une récupération d’autant plus facilitée que certains des libertaires d’alors sont devenus de parfaits libéraux…
Dès lors que reste-t-il aujourd’hui du mouvement hippie ? Au-delà de son incontestable apport culturel mais de son échec politique à radicalement transformer la société, il perdure l’un des aspects qui le cimenta : le rapport de l’homme à la nature. Un rapport qui, hier secondaire, est devenu l’une des préoccupations majeures de la société, à l’heure où les conséquences du réchauffement climatique et donc de la responsabilité écologique de l’Homme sont devenues incontournables.
Ainsi, à défaut de réels héritiers – les bobos, les hipsters, les écolos, les vegans le sont-ils vraiment ? – le mouvement hippie a laissé en héritage cette question environnementale qui aura bien besoin de paix et d’amour pour se régler.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 31 juillet 2021)