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En finir avec la malbouffe



Chacun se souvient du film de Claude Zidi « L'aile ou la cuisse » où le patron d'un guide gastronomique, campé par Louis de Funès, embarquait son fils, joué par Coluche, dans l'usine du redoutable Tricatel, incarné à l'écran par le truculent Julien Guiomar. Dans cette usine ultramoderne, le père et le fils voyaient alors se transformer des pâtes douteuses bien chimiques en de jolis poulets rôtis ou des poissons qu'on aurait dits pêchés du jour mais qui étaient aussi artificiels que peu goûteux. Dans ces années 70, Zidi avait ainsi choisi la comédie, voire la satire, pour dénoncer le revers de la médaille de la nourriture industrielle en plein essor : la malbouffe.

Un peu plus de vingt ans après ce film-culte, c'est en Aveyron, le 12 août 1999, que José Bové s'en prenait à McDonald's en « démontant » le fast-food qui était en construction à Millau. Là aussi, le paysan du Larzac et ses amis de la Confédération paysanne s'en prenaient à la malbouffe, non pas seulement dans une bataille pour le goût des bons produits, mais aussi dans un combat de longue haleine contre les multinationales de l'agroalimentaire et la grande distribution qui épuisent éleveurs et producteurs, et dupent souvent le consommateur avec un marketing très étudié.

Le rapport parlementaire sur l'alimentation industrielle présenté hier à l'Assemblée nationale dénonce, au-delà du goût et de l'impact socio-économique, un 3e aspect essentiel de la malbouffe : ses conséquences sur notre santé, pour ne rien dire de la souffrance animale qui en est un 4e. Ce n'est certes pas la première fois qu'on est alerté, notamment par les chercheurs et le milieu médical, sur la nocivité pour la santé de la présence de sel ou de sucre en trop grande quantité dans tel ou tel produit, de colorants, de conservateurs, de stabilisateurs, d'émulsifiants, etc. À telle enseigne que la semaine dernière, l'ONG Foodwatch a tiré la sonnette d'alarme sur l'ensemble des aliments « cachés » et d'origine animale que nous consommons dans les produits agroalimentaires industrialisés du quotidien.

Le rapport de la dernière commission d'enquête – pas encore enterré – présidée par Loïc Prud'homme, député La France insoumise de Gironde, bâti après 6 mois de travail et une quarantaine d'auditions, va cependant plus loin, car il aborde le problème dans sa globalité. Il fait, en effet, des propositions qui touchent à la fabrication des produits, à l'éducation des consommateurs, à la publicité, à la lutte contre les inégalités sociales ou encore à la recherche. Cette approche globale, frontale presque, est peut-être à même de créer un électrochoc salutaire à un moment clé où les Français se soucient de plus en plus de savoir de quoi sont faits les produits qu'ils achètent. Le succès des applications décryptant les ingrédients des produits est d'ailleurs là pour démontrer cette volonté de transparence pour manger mieux. Une volonté qui, incontestablement, en appelle désormais à une volonté égale et au courage des parlementaires et du gouvernement pour traduire très concrètement dans la loi, face à des lobbys de l'agroalimentaire aussi puissants que réfractaires, des mesures contraignantes qui apparaissent plus que jamais nécessaires.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 27 septembre 2018)

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