Depuis plusieurs semaines maintenant les Français observent avec consternation la survenue d’incendies de grande ampleur, de l’Hérault à l’Ardèche, de la Manche au Finistère, des Alpilles à la Gironde où le mégafeu de la Teste-de-Buch, tout près de la dune du Pilat, a suscité une vive émotion dans tout le pays. À la tristesse de voir des paysages familiers disparaître, de voir des centaines d’hectares engloutis par les flammes, de voir des habitants hébétés contraints d’évacuer dans l’urgence leur domicile ou leur résidence de vacances, de voir des entrepreneurs du tourisme ou de la sylviculture qui ont tout perdu ; à l’empathie et la reconnaissance ressenties envers les sapeurs-pompiers qui luttent avec professionnalisme et abnégation, sans relâche et au péril de leur vie, contre les flammes, à tous ces sentiments qui nous étreignent s’ajoutent la consternation et l’incompréhension lorsque les minutieuses enquêtes menées pour connaître l’origine du feu conduisent à l’implication volontaire de l’homme…
Certes, 90 % des incendies de forêts sont dus à l’homme. Des incendies involontaires qui montrent qu’en dépit de toutes les alertes émises par les autorités et de tous les articles de presse qui soulignent la fragilité de l’environnement en période de sécheresse et de canicule, les messages de grande prudence pour les touristes et les habitants sont encore à renforcer. La pédagogie est l’art de la répétition et il faudra encore et encore expliquer, éduquer les plus jeunes dès l’école au respect de la nature.
Mais à côté de ces incendies « accidentels » on trouve donc les incendies volontaires qui représentent 10 % des quelque 300 000 feux qui surviennent chaque année selon les données de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Et parmi les auteurs de ces incendies volontaires aux mobiles disparates - vandalisme gratuit, vengeance, escroquerie à l’assurance - on trouve des pyromanes. C’est-à-dire, au sens psychiatrique du terme, des hommes - les femmes ne représentent que 1 % des pyromanes - qui souffrent d’un trouble de la personnalité s’exprimant par la fascination du feu, de l’excitation du passage à l’acte à la satisfaction de contempler les flammes… et des conséquences qu’elles provoquent. Ces criminels reviennent en effet souvent sur lieu de leur forfait pour apporter leur aide aux secours et passer pour des sauveurs. Le pyromane se fait ainsi pompier… Mais que dire des pompiers-pyromanes : ce profil est - heureusement - rarissime mais il existe comme le montre l’enquête sur une série d’incendies dans l’Hérault.
Anticiper la pyromanie - dont le terme a été introduit pour la première fois en 1833 par le psychiatre français Henri Marc - relève de l’impossible gageure. Il y a aura, hélas, toujours des pyromanes. Raison de plus pour agir fortement en amont des incendies en sensibilisant la population aux risques, et en aval en renforçant les moyens des secours.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 29 juillet 2022)