Accéder au contenu principal

SOS Méditerranée

mer

SOS Méditerranée. L’expression renvoie immédiatement à l’organisation non gouvernementale éponyme qui, depuis 2015, avec courage et contre les critiques de l’extrême droite, porte secours en Méditerranée aux réfugiés en perdition sur des embarcations de fortune, prêts à tout pour fuir la guerre, la barbarie ou la misère. Le premier trimestre 2023 est d’ailleurs le plus mortel pour les migrants en Méditerranée depuis 2017, devenue un « cimetière » avec, depuis 2014, 27 047 personnes disparues selon le décompte de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) le mois dernier.

Mais à ce SOS humanitaire qui pose la question des flux migratoires pourrait répondre un autre SOS, environnemental celui-là, qui concerne les écosystèmes marins. Les canicules océaniques, qui touchent près de la moitié des eaux du globe, menacent de transformer en profondeur ces écosystèmes déjà affaiblis par le réchauffement climatique. Ce mois-ci, 44 % des océans du monde subissent des vagues de chaleur marines d’ampleur, un record depuis 1991 selon l’Administration océanographique américaine NOAA, qui estime que cette proportion pourrait atteindre 50 % d’ici à septembre-octobre. La température mondiale des océans avoisine 21 °C, proche du record absolu (21,1 °C). En Méditerranée, on relève même 30 °C localement (4 °C au-dessus des normales) entre la Sicile et Naples…

Ces vagues de chaleur marine, qui ont doublé en fréquence depuis l’ère préindustrielle selon les spécialistes du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) ont des conséquences directes et concrètes en Méditerranée. Lors des canicules 2015-2019 en Méditerranée, une cinquantaine d’espèces (coraux, gorgones, oursins, mollusques, bivalves, posidonies, etc.) ont été affectées par des mortalités massives entre la surface et 45 mètres de fond, selon un article paru en juillet 2022 dans la revue scientifique Global Change Biology. Et l’on observe aussi la fuite de poissons partant chercher des eaux plus fraîches ou l’arrivée de nouvelles espèces comme des crabes ou des méduses.

Ce bouleversement de la Méditerranée, qui ne représente que 0,7 % de la surface des océans mais constitue un des réservoirs majeurs de la biodiversité marine et côtière – 10 % des espèces répertoriées mondialement – devrait tous nous interpeller et nous pousser à agir mais force est de constater que les réponses sont encore trop légères. Certes des initiatives ont été prises, notamment en Occitanie, déjà l’an passé, pour préserver les fonds du parc naturel marin du golfe du Lion. Mais face à la répétition des canicules et à l’ampleur du phénomène, une action internationale et concertée de tous les pays de la Méditerranée paraît indispensable pour que cette Mare Nostrum, berceau de tant de civilisations, continue à émerveiller les générations futures.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 24 juillet 2023)

Posts les plus consultés de ce blog

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...

Fragilités

Les images que les Français ont découvertes cette semaine à l’occasion des violentes intempéries qui ont frappé le Sud-Ouest étaient spectaculaires : un TGV comme suspendu dans le vide, reposant sur des rails sous lesquels le ballast a été emporté par des flots déchaînés. Inouï comme le nom du train qui transportait quelque 500 passagers qui se souviendront longtemps de leur voyage et de leur évacuation en pleine nuit à Tonneins – parfaitement maîtrisée par les secours, les personnels de la SNCF et les agents de la ville. Le jour d’après, à l’issue du remorquage du TGV, avait des allures de gueule de bois pour tout le monde devant les dégâts considérables sur la voie de chemin de fer. 200 mètres sont complètement à refaire, les pluies torrentielles ayant emporté la terre du remblai, la sous-couche et le ballast. Et si les travaux ont commencé dès après les orages, ils vont être longs, bloquant la liaison entre Toulouse et Bordeaux. La SNCF mise sur une reprise du trafic entre le me...

La messe est dite ?

    L’entourage de François Bayrou a beau tenter d’expliquer que l’échec du conclave sur les retraites n’est imputable qu’aux seuls partenaires sociaux qui n’ont pas réussi à s’entendre en quatre mois pour « améliorer » la contestée réforme des retraites de 2023, la ficelle est un peu grosse. Car, bien évidemment, cet échec – hélas attendu – est aussi celui du Premier ministre. D’abord parce que c’est lui qui a imaginé et convoqué cette instance inédite de dialogue social et qu’il aurait naturellement revendiqué comme le succès de sa méthode un accord s’il y en avait eu un. Ensuite parce qu’il n’a pas été l’observateur neutre des discussions, qu’il promettait « sans totem ni tabou ». Il a au contraire, plusieurs fois, interféré : dès leur lancement en les corsetant par une lettre de cadrage imposant de ne pas créer de dépenses et d’équilibrer les comptes à l’horizon 2030 ; ensuite par son refus de voir abordé l’âge de départ à 64 ans, point centra...